Quelques
lecteurs se sont étonnés que le blog parle des patients au
delà-même des temps de créations en ateliers, et du rapport entre
la maladie et la pratique artistique.
Je
ne peux pas parler uniquement de dessin. Les ateliers avec les
patients, mon travail de dessin personnel, et par là même ce
journal, se nourrissent du temps que je passe à leurs côtés. De
nos échanges, des relations que je tisse avec eux au jour le jour.
Ces
relations progressent. Assez vite finalement. Même si ce n'est
jamais gagné. Chaque jour, je sais mieux comment regagner le sourire
de Lilas, la confiance d'Irène, l'attention de mr Eko, l'amitié de
Sonia, la paix de Maguie, et le bonjour des autres. La recette est
simple, mais tout est question d'attention à l'instant présent. La
main sur l'épaule, le sourire, l'échange quotidien, la touche
d'humour, ne sont parfois pas du tout adaptés au moment précis. Il
faut savoir respecter, contourner la saute d'humeur, la conscience
lourde, l'angoisse. Pour mieux revenir. De mes attentions et de mon
investissement dans la relation dépend leur présence à l'atelier,
leur envie de dessiner, la confiance qu'ils ont en moi, et le lâcher
prise dans la couleur. Sans oublier bien entendu, le bien être
qu'ils en retirent, et le travail (le mien, et le nôtre) qui avance.
Je
passe donc beaucoup de temps avec eux. Individuellement ou en groupe.
Dans les couloirs, la salle à manger, l'atelier. Le matin après
leur petit déjeuner, le midi en m'installant parfois avec eux,
l'après midi... Je prends le temps chaque matin de les saluer un à
un ou presque ; et le soir, manteau sur le dos, de leur
souhaiter une bonne soirée, et de leur dire à demain. Je ponctue
mon travail de ces temps de présence, et d'échange. Qui nous font
avancer. Dans ce chemin que je nous construis quelque part, avec
eux ; et parfois quelque peu à leur insu.
Je
passe également beaucoup de temps à les regarder, les écouter,
pour comprendre qui ils sont, ce qu'ils vivent et comment ils le
vivent. Chacun. Et je note, je croque, je photographie. Je passe des
matinées dans les couloirs,à suivre, à poursuivre *1 l'un ou et
l'autre. Crayons de couleurs à la main, je trace sur mon plan, les
déambulations du moment, les allées venues, les kilomètres
parcourus. Pour mieux les redessiner ensuite.
Nombreux
sont donc pour l'instant les articles de ce journal, qui relatent par
bribes ces relations, et observations. Ma visée n'est pas
scientifique, ni systématique, ni sociologique. L'individu prime sur
le groupe, dans ce travail pour l'instant. L'humain sur la maladie.
La sensation et l'expression sur une véritable conceptualisation. Un
travail de réflexion est en cours, et s'écrit avec un nécessaire
recul. Certains articles ou du moins leur ébauches seront bientôt
publiés sur ce blog. Ainsi que la série de portraits dessinés et
écrits sur lesquels je travaille actuellement.
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